Le journal de bord de ma reconversion

J'ai senti le besoin d'écrire cet article il y a déjà un bon moment.

En fait, dès le mois de juillet, j'ai commencé à parler autour de moi de ma decision de laisser tomber le CAPES, les réactions des profs étaient totalement différentes de celles des autres personnes de mon entourage. J'ai d'abord été surprise, je ne savais pas quoi répondre. C'est vrai, les premières réactions de mes proches étaient de dire que ma décision était la bonne, qu'il fallait arreter les frais, pour certains, cela a même été un soulagement! Alors je ne m'étais pas préparée à être confrontée à la réaction inverse.

Je ne pourrais pas répondre ici au pourquoi de cette réaction propre aux enseignants (qu'ils soient prof des écoles, en collège ou en lycée). Je pourrais juste avancer quelques hypothèses: ils sont passionnés par leur métier et veulent me communiquer leur enthousiasme, ou bien, ils ne comprennent pas ma réaction face à l'échec puisqu'ils ont réussi...

Bref, passé la surprise, je me suis dis que c'etait une bonne chose de pouvoir débattre de ce sujet, c'était un moyen pour moi de verifier que mon choix était basé sur des raisons solides.

Ce que je n'avais pas perçu de suite, c'est que leur réaction n'était pas logique, je me confrontais finalement à des personnes qui voulaient me convaincre moi mais pas être convaincues. Il a fallu donc maintes fois ré-expliquer, trouver toute une panoplie d'arguments définitifs qui mettent un terme au débat.

Il est devenu lassant, aussi bien pour moi que pour Gilles, de rabacher ce laïus, de revenir sur une décision acquise pour la plupart et depuis laquelle bien du chemin a été parcouru. Je l'écris ici pour y renvoyer tout ceux qui ont encore besoin de remettre en doute mon choix.

Voilà donc la révélation: pourquoi je ne retente pas une cinquième fois le CAPES d'arts plastiques:

1: J'ai 27 ans, bientôt 28. Gilles et moi nous voulons avoir des enfants. Or il est scientifiquement prouvé qu'après 30 ans, le risque de complications lors de la grossesse augmente, je veux donc pouvoir avoir mon premier enfant avant cet âge.

2:J'avais déjà pris la decision en 2009: la tentative 2010 serait la dernière. J'avais même commencé à repérer des pistes de métiers alternatives, ma décision est le fruit d'une longue réflexion.

3: Lors de la préparation à cette dernière session du CAPES, j'ai mis toutes les chances de mon côté. J'étais au maximum de mes possibilités. Pourtant, mes notes n'étaient pas bonnes, elles étaient à peine meilleures qu'en 2009. J'ai manqué le concours à plus de 20 points en dessous du barème d'admission. Comment dans ce cas pourrais-je espèrer faire mieux en novembre 2010? Le concours a changé dans sa forme, mais le fond reste le même.

4: Les trois test de profil professionnel que j'ai faits sont tous d'accord sur un point: je n'ai pas le profil professionnel d'une enseignante.

5: Je n'ai pas envie de passer le concours de prof des écoles, ce métier ne m'intéresse pas et je n'ai absolument pas le niveau en maths, en histoire, etc... Par ailleurs, mes connaissances en pédagogie et en didactique sont toutes basées sur la divergence: c'est à dire qu'en arts pla, une séquence réussie est une séquence où chaque élève obtient un résultat différent, chaque élève exprime sa personnalité. Je me vois mal appliquer cette méthode pour l'apprentissage de l'orthographe ou de la géométrie! En outre, le concours de prof d'arts pla dans le privé est semblable au CAPES, donc aucune chance pour que je le passe. J'ai cotoyé des personnes qui avaient enchaîné les CDD pendant 10 ans, pour au final se retrouver au même point qu'à la sortie de la fac. Aller de CDD en CDD dans l'éduc nat ou le privé ne me convient pas, je veux un emploi stable.

6: Oui, le confort du staut de fonctionnaire est enviable. Et bien je vous informe qu'il y a d'autres fonctions, tel celle d'adjoint administratif, qui me permettraient d'accéder à ce statut. En prime, pas de mouvement inter-académique si je passe les concours "déconcentrés". Je compte donc m'inscrire à quelques concours administratifs en 2011.

Pour ceux qui ne seraient pas encore convaincus, j'en remet une couche:

7: Que je devienne menuisier, dessinatrice en bureau d'étude, secrétaire comptable etc...Je serais toujours moins confrontée à la violence qu'en devenant prof. Regardez, en 6 mois, lorsque j'étais prof contractuelle, je me suis faite insulter, j'ai du séparer des élèves qui se battaient en plein cours, négocier avec un élève pour qu'il me donne le couteau qu'il avait dans sa poche et gérer l'arrivée dans une classe de sixième d'une élève victime de viol, sans avoir jamais été préparée à faire face aux remarques blessantes de ses nouveaux camarades. Je précise que tout cela s'est passé dans un établissement qui n'est pas classé ZEP. La passion de l'enseignement m'a fait ignorer pendant un moment cet aspect du métier, mais c'est terminé.

Bonus track:

8: Qu'est ce que ça me couterais de repasser le CAPES en novembre en touriste? environ 500 euros. Et pour toutes les raisons évoqué ci-dessus, je ne suis prête ni à les déboursés, ni à les empruntés.